« J’ai refusé la ponction par le Président de l’Assemblée Nationale de 10.000 MRU de mon salaire pour Gaza, car j’estime que cet argent doit plutôt aller aux Gazaouis de l’intérieur » Dixit Birame Dah Abeid
conférence de presse de Birame Dah Abeid
- Publié par Aidara cheikh --
- Wednesday, 22 Nov, 2023
Lors d’une conférence de presse animée lundi 20 novembre 2023 à Nouakchott, le député Birame Dah Abeid, président du mouvement antiesclavagiste IRA, a déclaré que le geste faussement humanitaire destiné à venir en aide à Gaza serait plus significatif si le même élan humanitaire profitait aux esclaves affranchis sans gîte et sans couverture sociale, aux veuves et aux orphelins du Passif humanitaire qui sont dans un total dénuement après l’assassinat de leurs uniques soutiens.
« C’est pourquoi, a-t-il dit, j’ai refusé de rentrer dans le jeu du Président de l’Assemblée Nationale qui a décidé de ponctionner 10.000 MRU sur le salaire des députés pour soi-disant aider les populations de Gaza. J’ai catégoriquement refusé car j’estime que nous avons des populations qui souffrent autant que les Gazaouis, victimes de spoliation foncière, d’emprisonnements abusifs, de violences et de privations de liberté et de droits »
Et d’ajouter « les Gazaouis n’ont pas besoin de votre aide, car eux au moins ils fabriquent des armes capables de contrer l’arsenal de guerre d’Israël et de ses alliés, alors que vous n’êtes même pas capables de fabriquer une aiguille ».
Il a fustigé dans ce cadre le traitement réservé aux populations de seconde zone, celles des hameaux et des localités reculées, mais aussi celles des périphéries des grandes villes qui n’ont aucun droit dans leur pays, alors que les citoyens de première zone bénéficient d’une totale impunité par le truchement du népotisme et du clientélisme politique.
A ce titre, il considère que les institutions chargées de la défense des droits humains en Mauritanie, la Commission nationale des droits de l’Homme, le Commissariat aux droits de l’Homme, l’institution chargée de la lutte contre l’esclavage et la traite des personnes ainsi que le mécanisme contre la torture, ne sont en réalité que des structures chargées de blanchir les nombreuses violations des droits de l’Homme commises en Mauritanie auprès des partenaires et institutions internationaux.
Comme exemple, Birame a cité ce qu’il considère être la supercherie dite de lutte contre l’esclavage, alors même que l’administration civile, judiciaire et militaire ainsi que le gouvernement blanchissent tous les cas d’esclavage exposés devant les tribunaux tout en accordant l’impunité à leurs auteurs. A titre d’illustration, il met au défi l’Etat mauritanien de lui sortir le moindre détenu pour actes esclavagistes alors même que plusieurs d’entre eux ont été jugés et condamnés par les tribunaux, sachant que les peines vont de 10 à 20 ans. « Ces auteurs restent tout au plus 1 ou 2 mois » affirme-t-il.
D’autre part, Birame déclare contredire les avancées déclarées par l’Etat mauritanien dans le cadre de la lutte contre l’esclavage, mettant en défi les autorités de lui sortir le moindre indicateur en termes de nombre d’esclaves libérés par leurs soins, d’esclaves affranchis pris en charge, du nombre d’auteurs d’actes esclavagistes condamnés et détenus en prison, entre autres signes de performance.
Deux cas d’esclavage et de traite de personne viennent selon lui d’être dénoncés ces jours-ci dans la région du Brakna, ce qui confirme selon lui la persistance insidieuse du phénomène. Un communiqué diffusé par IRA le 20 novembre est revenue en détail sur ces deux cas.
C’est dans ce cadre que le mouvement IRA estime que la banalisation des crimes d’esclavage accentue ses pratiques en Mauritanie et que l’impunité juridique les perpétue.
D’un autre côté, selon Birame, des marches de solidarité avec le peuple palestinien, dont il ne nie pas selon lui la légitimité, s’organise, alors que les marches des opprimés sous les gouvernances successives sont matées avec la plus grande brutalité, alors même qu’il s’agit de manifestations pour la restitution de droits spoliés.
A ce titre, Birame affirme avoir été sollicité par les veuves et les orphelins du Passif humanitaire pour les soutenir dans la marche qu’ils comptent organiser les 26 et 27 novembre prochain, comme chaque année à la veille de la fête de l’indépendance, afin de s’épancher et pleurer les 28 soldats négro-mauritaniens, leurs pères, frères, oncles, fils, neveux, pendus le 28 septembre 1991 à Inal le jour de la commémoration de l’indépendance nationale.
Cheikh Aïdara
L’impunité juridique perpétue l’esclavage en Mauritanie
Le représentant d’IRA à Boghé (Localité dépendant de la région du Brakna, située à 150 km au sud-ouest d’Aleg, la capitale régionale), Mr Khoumeyni Laghdaf, informa la mission d’IRA le samedi 14 octobre 2023 qu’il a trouvé un enfant, Mahmoud Abdallahi (10 ans), dans un piteux état après avoir marché 18 km à pied et qu’il l’a emmené au commissariat de police en attendant de trouver quelqu’un de sa famille ou de la famille qui l’exploitait. L’enfant Mahmoud Abdallahi est de la localité de Mayguoum, située dans département de Bababé (à 80 km de Boghé, dans la Vallée du fleuve Sénégal) et travaillait à Dourweit entre les municipalités de Boghé et Bouhdida à 90 km de sa famille à Mayguoum.
Il gardait les troupeaux pour son exploiteur Bah Abdelwehab mais quand ce dernier a appris que des activistes d’IRA, réputés rigoureux et entreprenants, à travers les plaintes qu’ils portent devant les tribunaux contre les esclavagistes et trafiquants d’enfants en faveur des victimes, sont dans la région, ils se sont empressés de chasser l’enfant pour éviter d’être découvert en flagrant délit d’esclavage et d’exploitation de mineur.
La délégation d’IRA est arrivée à la brigade de Boghé le 14 octobre 2023 à 10h30 et a trouvé le commissaire de police de la ville, sur le point de libérer le bourreau Bah Abdelwehab. L’enfant a été signalé et son exploiteur dénoncé par les militants locaux (section IRA de Boghé) qui avaient intercepté le garçon Mahmoud Abdallahi en détresse et en errance. La délégation d’IRA a demandé les raisons de cette libération prématurée ; l’officier de police judiciaire leur répondit que la mère de la présumée victime Mahmoud Abdallahi a dit qu’il est né en 2003 et qu’il est majeur donc le procureur d’Aleg Cheikh Baye nous a dit de le libérer.
La délégation a demandé des preuves car de l’enfant ne leur parait pas avoir plus de 10 ans. Quelques minutes après le commissaire est revenu leur dire : « nous, on ne travaille pas avec les organisations, on travaille seulement avec le procureur et il nous a dit de le libérer ». La délégation lui a expliqué que s’il le libère, il devra les mettre à sa place. Le commissaire comprit le message et après quelques échanges entre la délégation d’IRA et le procureur, le commissaire revient quelques instants après pour le mettre sous contrôle judiciaire.
La délégation lui demanda de leur confier la garde de l’enfant, il a répondit qu’il faut l’autorisation du procureur mais poursuit-il : « Il est avec sa mère et ne trouvera pas mieux qu’elle pour le garder » la délégation répliqua que sa mère est complice de son exploitation et qu’elle doit être mise aux arrêts elle aussi. Ainsi le procureur refusa de l’éloigner du commissariat et de ses exploiteurs le commissaire a pris le soin de violer la procédure en s’entêtant à garder l’enfant dans le lieu de détention de la police avec le présumé exploiteur de l’enfant Bah Abdelwahab et la mère de l’enfant Vatimetou Mamadi qui est elle aussi esclave de l’exploiteur et à laquelle l’exploiteur a fait appel pour témoigner à sa décharge contre les allégations de l’enfant.
Le 17 octobre le procureur Cheikh Baye ordonne le transfert du dossier de la police vers la gendarmerie et le 18 octobre 2023, ils sont déférés devant le procureur de Aleg qui les a accusé d’exploitation de mineur et les a renvoyé vers le juge d’instruction Moctar Mohamed Hacen avec une demande de contrôle judiciaire justifiant cette clémence qu’il s’agit d’une femme, et d’un homme âgé et souffrant de diabète. Le juge d’instruction s’est contenté d’une garantie de présence.
Nouakchott 20/11/2023
La commission de communication