Hajiratou Bâ : députée et maire en première ligne contre les mutilations génitales féminines
Les MGFS, un drame qui perdure en Mauritanie
- Publié par Aidara cheikh --
- Thursday, 21 Nov, 2024
Dans la commune de Gouraye, la plus vaste commune rurale de Mauritanie située dans la région du Guidimakha, où les mutilations génitales féminines (MGF) restent largement répandues, Hajiratou Bâ, 52 ans, se démarque comme une personnalité politique influente. Mère de cinq enfants, dont deux filles, elle cumule les fonctions de députée du département de Khabou et de maire de Gouraye, un double mandat qui la place comme une figure unique sur la scène politique nationale. Profondément attachée à sa communauté, elle consacre ses efforts à l'amélioration des conditions de vie de ses concitoyens. Parmi ses nombreux engagements, son combat le plus ardent est celui contre les pratiques néfastes des MGF, une cause qu'elle défend avec détermination.
Tout a commencé lorsqu’une adolescente de son village, Halima, a failli perdre la vie à cause d’une infection sévère survenue après une excision clandestine. Hajiratou Bâ se rappelle encore le visage dévasté de sa mère, venue supplier le conseil municipal d’intervenir pour que cette pratique cesse. Ce drame a marqué un tournant dans sa vie. "Nous, les dirigeants locaux, avons la responsabilité de protéger nos filles. Il ne suffit pas de construire des écoles ou des routes, il faut aussi briser les chaînes de ces traditions qui détruisent nos enfants," dit-elle.
Hajiratou Bâ a décidé d’agir. Elle a d'abord cherché à comprendre les racines de cette pratique et les raisons qui poussaient les familles à continuer à exciser leurs filles. Avec l’appui de l’ONG ACTIONS travaillant dans la région avec l’appui de l’UNFPA et UNICEF, elle a participé à des formations et rencontré des victimes qui lui ont raconté leurs souffrances. Ces témoignages lui ont donné une conviction encore plus forte : il fallait mobiliser toute la commune pour lutter contre cette tradition néfaste.
Lors des réunions du conseil municipal, elle a commencé à plaider pour que la lutte contre les MGF soit une priorité locale. "Nos villages sont touchés par ce fléau. Nous devons intégrer cette lutte dans nos politiques locales, en sensibilisant les populations et en soutenant les victimes," martelait-elle.
Avec détermination, Hajiratou Bâ a proposé une mesure audacieuse : créer une ligne budgétaire dédiée aux campagnes de sensibilisation contre les MGF et à l’appui des victimes. Elle a plaidé auprès de ses collègues, leur expliquant que les ressources investies sauveraient des vies et protégeraient l’avenir des jeunes filles. "Chaque fille que nous sauvons est une victoire pour notre communauté," affirmait-elle.
Grâce à sa persévérance et au soutien d’alliés au sein du conseil, la ligne budgétaire a été adoptée. Avec ces fonds, la commune a lancé des campagnes de sensibilisation dans les villages, impliquant les chefs traditionnels, les femmes leaders et les jeunes. Les victimes ont également commencé à recevoir un accompagnement psychologique et médical.
Aujourd’hui, Hajiratou Bâ est fière des progrès réalisés. "Le chemin est encore long, mais le silence autour des MGF commence à se briser," dit-elle avec espoir. Elle continue de plaider pour une mobilisation plus large, convaincue que les élus locaux ont un rôle clé à jouer dans cette lutte. Pour elle, protéger les jeunes filles, c’est garantir un avenir meilleur pour toute la communauté.
NB : Ce récit met en lumière l’engagement d’un élu local, soulignant son rôle crucial dans la sensibilisation et l’allocation de ressources pour combattre les MGF.