Vacances, farnientes et cultures contre nourriture, emplois et développement
acances, farnientes et cultures
- Publié par Aidara cheikh --
- Tuesday, 16 Sep, 2025
Les mois d’août et septembre 2025, mois par excellence des vacances, ont été galvaudés par l’appel du président Ghazouani intimant aux cadres de l’administration et au mauritanien lambda, à troquer leurs vacances hors du pays par des expéditions touristiques à l’intérieur de la Mauritanie profonde. Du coup, partout, chants et danses, financés à coups de millions d’ouguiyas, se sont élevés sur des montagnes de misère et de pauvreté.
Déjà en août 2025, les vacances ministérielles diffusées sur les réseaux sociaux avec photos et vidéos de belles villégiatures avaient soulevé le courroux de bien d’administrés, étonnés de voir des gens qui n’ont rien fait au niveau de leur département respectif se pavaner avec leur argent. Si l’on sait que depuis le gouvernement Ould Diay, l’école est toujours confuse, il n’y a pas d’eau, pas d’électricité, Nouakchott patauge sous les eaux, la santé est à son bas niveau, les routes continuent de tuer, l’argent ne circule plus, manger deux fois par jour devient un exploit, les jeunes sont sans emploi, parler librement devient un crime, les opinions sont muselées, les partis politiques distribués au faciès, et les libertés publiques confisquées.
Ghazouani prône des vacances au terroir
Puis vint la décision présidentielle d’interdire les vacances hors du pays pour les responsables de l’Etat. Des centaines de passeports ont été confisqués à l’occasion au niveau de l’aéroport de Nouakchott. Ce qui n’a pas empêché les plus malins à emprunter l’aéroport Blaise Diagne au Sénégal pour s’exfiltrer.
Pour les autres, ils ont pris la route vers les contrées lointaines du pays.
Les valses tribales
Août et Septembre 2025 furent pratiquement fructueux pour les rencontres tribales. Sur les réseaux sociaux, ces rassemblements ont donné lieu à des festivités dignes des Emirats d’antan. Un Emir qu’on intronise par-là, au milieu de danses folkloriques enveloppées par le bruit assourdissant de fusils à poudre. Là-bas, ce sont deux tribus alliées qui renouvellent une alliance séculaire. Au milieu de la verdure, des images de pluies généreuses, des têtes de mouton et de chameaux sacrifiés, la ripaille à bout de champ, dans des contrées jadis assombries par la pauvreté, le dénuement et la misère.
L’instant d’une euphorique festivité, où des millions sont claqués en un tour de main, les populations locales retombent dans leur amer quotidien.
Des festivals partout
Plusieurs festivals culturels et artistiques ont strié le pays, d’Est en Ouest, du Sud au Nord. Deux ou trois nuits d’euphorie, puis la gueule de bois, après des nuits d’ivresse joyeuse.
Le plus grand de ces festivals où des fortunes ont été englouties, c’est sans doute cette 4ème édition d’Aïoun du 12 septembre, celui qu’organise le fils du général Mesgharou. Des festivaliers venus de partout, des affiches alléchantes, en présence d’influenceurs connus pour leur palmarès d’insultes, de diffamation et de sordidité, et pourtant si populaires. Même le ministre de la Culture a fait le déplacement, ce qu’il fait rarement et pas au pif.
Il est même parti à quelques encablures de là, à Néma, le samedi 13 septembre lors de la 1ère édition de la semaine nationale des arts et de la culture de la région du Hodh Echarghi.
Monguel, dans la région du Gorgol a connu aussi ses journées culturelles et touristiques, dont le monument historique commémorant la bataille de « Bathet Moïte » menée par l’Emir Bakar Ould Soueid’Ahmed contre l’armée coloniale française.
Kiffa, au cœur de l’Assaba n’a pas échappé à la contagion festivalière, clôturant sa semaine nationale de la culture et des arts le vendredi 12 septembre au moment où d’autres villes prenaient le relais.
Une économie locale qui en profite
Même si leurs retombés sont éphémères et limités, tous les festivals permettent au moins, l’espace de quelques jours, de donner un nouveau souffle aux économies locales. A Aïoun, le litre de lait qui se négocie en temps normal autour de 30 à 50 MRU a bondi à 800 MRU. Les boutiquiers, les vendeurs de couscous, le commerce d’habillement, entre autres, engrangent des bénéfices substantiels. Des emplois temporaires sont créés pour la jeunesse locale, et des amitiés se tissent.
Absence de vision à long terme
Les semaines de la culture et des arts, les festivals folkloriques, c’est beau, mais des actions plus concrètes doivent accompagner ces activités en mettant en place les outils de développement local intégré. Ces régions qui abritent festival après festival ne peuvent pas éternellement dépendre d’occasions ponctuelles de quelques jours pour renflouer leur économie. L’essentiel de ces grandes villes qui abritent ces manifestations, Néma, Aïoun, Kiffa et les autres, restent encore prisonnières d’une pauvreté endémique dans tous les domaines, avec une urbanisation qui tarde à s’installer. Les populations sont extrêmement pauvres et démunies, manquant le plus élémentaire service.
Ces dizaines de festivals et de rencontres au cours des vacances constituent pour les populations locales, une accumulation de provocation et de frustration, avec ces centaines de richesses étalées, véhicule 4X4 dernier cri défilant dans une insolente insulte, rivières de sang de bétail égorgé, fleuve d’argent sonnant et trébuchant vite happés par des courtisans venus d’ailleurs…
Taghi
