Gaza : après la décision de la CIJ, l'Arabie saoudite demande à ce qu'Israël «rende des comptes»

L'Arabie Saoudite demande de rendre des comptes

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L'Arabie saoudite s'est félicitée vendredi de la décision de la Cour internationale de justice (CIJ) concernant Israël, appelant la communauté internationale à « faire rendre des comptes à Israël » pour ses « violations systématiques » du droit international.
Gaza : après la décision de la CIJ, l'Arabie saoudite demande à ce qu'Israël «rende des comptes»
Dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères, le royaume a également appelé à « davantage de mesures » pour parvenir à un « cessez-le-feu dans la bande de Gaza » et fournir « une protection au peuple palestinien ».

Le Qatar s'est félicité ce vendredi de la décision de la Cour internationale de justice, saluant « une victoire pour l'humanité ». Dans un communiqué, le ministère qatari des Affaires étrangères a « salué les mesures provisoires ordonnées par la CIJ », se félicitant d'une « victoire pour l'humanité (...) et la justice internationale ».

Dans une décision très attendue, la plus haute juridiction de l'ONU a appelé vendredi 26 janvier Israël à faire tout son possible pour empêcher tout acte de « génocide » dans la bande de Gaza et à laisser entrer l'aide humanitaire.

RFI

Accusations de "génocide" : la CIJ met en garde Israël, incertitudes sur la mise en œuvre du verdict

 Une "étape historique" saluée par Pretoria, une "honte" dénoncée par Benjamin Netanyahu. Dans le cadre d'une procédure intentée contre Israël par l'Afrique du Sud, la Cour internationale de justice (CIJ) – plus haute juridiction de l'ONU – a rendu une décision très attendue, vendredi 26 janvier, appelant Israël à faire tout son possible pour empêcher tout acte de "génocide" dans la bande de Gaza et à laisser entrer l'aide humanitaire.

Si à ce stade, la CIJ ne se prononce pas sur la question de savoir si Israël commet un génocide à Gaza, elle a néanmoins appelé l'État hébreu à s'abstenir de tout éventuel acte génocidaire alors qu'il poursuit son opération militaire dans la bande de Gaza.

Israël doit prendre "des mesures immédiates et efficaces pour permettre la fourniture des services de base et de l'aide humanitaire dont les Palestiniens ont un besoin urgent pour faire face aux conditions de vie défavorables auxquelles sont confrontés les Palestiniens", a statué la cour.

La procédure sur la reconnaissance d'un éventuel génocide à Gaza pourrait prendre des années, et la CIJ n'a pas non plus évoqué pour l'heure de cessez-le-feu. Elle a en revanche appelé Israël à "prendre toutes les mesures en son pouvoir pour empêcher" les actes qui pourraient relever de la Convention des Nations Unies sur le génocide, établie en 1948 après l'Holocauste et sur la base de laquelle l'Afrique du Sud a intenté cette procédure contre Israël. Elle a également déclaré qu'Israël devrait "prévenir et punir" toute incitation au génocide.

Juridiquement contraignantes, mais aucun moyen de les faire appliquer

Les décisions prises par la CIJ s'imposent à tous les États membres de l'ONU, ce qui est le cas d'Israël. Mais faute d'armée ou de police internationale, la plus haute juridiction de l'ONU n’a pas les moyens de les faire exécuter. Elle a, par exemple, ordonné à la Russie de suspendre son invasion de l'Ukraine, sans résultat.

"La CIJ est acceptée par l’ensemble des pays membres des Nations unies. Elle se prononce sur le rôle des États, mais avec aucun moyen d’imposer ses décisions", rappelle Jean-Paul Chagnollaud, président de l'Institut de recherche et d'études Méditerranée Moyen-Orient (iReMMO), sur France 24. "Nous sommes dans une situation où elle ordonne des mesures transitoires qui sont certes importantes sur le plan politique, mais on ne va pas plus loin."

Par ailleurs, les décisions sont systématiquement envoyées au Conseil de sécurité de l'ONU, et peuvent donc se heurter, en l'espèce, au veto américain si les juges vont à l'encontre de l'État hébreu.

La décision des juges de la CIJ peut également avoir un impact sur les alliés d'Israël, à l'encontre desquels pourrait être retenue une complicité pour livraison d'armes ou soutien diplomatique.

"Aujourd'hui, cette obligation est déclenchée pour l'ensemble des États et pour les alliés d'Israël", affirme sur France 24 Johann Soufi, avocat, ex-chef du Bureau des affaires juridiques de l'Unrwa – l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens –, s'appuyant sur un précédent datant de 2007, lorsque la CIJ était intervenue entre la Bosnie et la Serbie. "Aujourd'hui, ces mesures, c'est l'UE, la France, les États-Unis et l'ensemble des États qui doivent les prendre."

"Il est beaucoup plus difficile pour d'autres États de continuer à soutenir Israël face à une tierce partie neutre qui estime qu'il existe un risque de génocide", analyse de son côté pour l'AFP Juliette McIntyre, experte en droit international à l'Université d'Australie du Sud.

Plus qu'une décision symbolique, l'ordonnance rendue par la CIJ est considérée comme une réprimande de la conduite d'Israël dans la guerre. En l'enjoignant de "prévenir la destruction et assurer la conservation des éléments de preuve", la Cour ordonne à Israël de présenter un rapport dans un délai d'un mois pour montrer qu'il s'est conformé à son arrêt.

02:23 La décision de la CIJ est un "développement important" qui "contribue à isoler Israël" et "dénoncer ses crimes" dans la bande de Gaza, a réagi le Hamas dans un communiqué.

L'ordonnance rendue par la CIJ est "un avertissement important qu'aucun État n'est au-dessus de la loi", a pour sa part réagi le ministre des Affaires étrangères de l'Autorité palestinienne, Riyad al-Maliki, dans un message vidéo. "Les États ont désormais l'obligation juridique claire de mettre fin à la guerre génocidaire d'Israël contre le peuple palestinien de Gaza."

De son côté, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu juge "scandaleuses" les accusations de "génocide" à Gaza portées par l'Afrique du Sud.

"La tentative ignoble de refuser à Israël" le "droit fondamental" de se défendre est "une discrimination flagrante contre l'État juif, et elle a été rejetée à juste titre", ajoute-t-il.

De Pretoria à Washington, réactions en chaîne

Particulièrement attendue, cette décision n'a pas tardé à faire réagir. À l'origine de la procédure, l'Afrique du Sud a salué vendredi une "victoire décisive pour l'État de droit international et une étape importante dans la quête de justice pour le peuple palestinien", à l'issue de l'audience de la CIJ à La Haye.

Dans son communiqué, le ministère sud-africain des Affaires étrangères estime que la Cour "a déterminé que les actions d'Israël à Gaza sont plausiblement génocidaires et a indiqué des mesures provisoires sur cette base", la remerciant "pour sa décision rapide".

De son côté, l'Union européenne attend une mise en œuvre "complète et immédiate" du verdict rendu par la CIJ.

Les décisions "de la Cour internationale de justice sont contraignantes pour les parties et celles-ci doivent s'y conformer. L'Union européenne attend leur mise en œuvre complète, immédiate et effective", a indiqué un communiqué commun du chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, et de la Commission européenne.

L'Espagne, l'une des voix les plus critiques en Europe à l'égard d'Israël depuis le début du conflit avec le Hamas, a salué la décision de la CIJ.

"Nous saluons la décision de la Cour internationale de justice et demandons aux parties d'appliquer les mesures provisoires qu'elle a décrétées", a indiqué le Premier ministre socialiste Pedro Sanchez dans un message publié sur le réseau social X.

La France a indiqué quant à elle que la décision de la Cour internationale de justice "renforçait sa détermination" à œuvrer pour un cessez-le-feu. Dans son communiqué, le ministère français des Affaires étrangères indique envisager de faire part d'"observations" à la CIJ, dans lesquelles la France indiquera notamment "l'importance qu'elle attache à ce que la Cour tienne compte de la gravité exceptionnelle du crime de génocide, qui nécessite l'établissement d'une intention".

"Nous espérons que les attaques d'Israël contre les femmes, les enfants et les personnes âgées prendront fin", a réagi pour sa part Recep Tayyip Erdogan. La Turquie continuera "de suivre le processus (judiciaire) pour garantir que les crimes de guerre commis contre des civils palestiniens innocents ne restent pas impunis". Une semaine plus tôt, le président turc avait affirmé que son pays fournissait des preuves à charge contre Israël à l'Afrique du Sud.

Principal allié d'Israël, les États-Unis ont réaffirmé quant à eux que les accusations de "génocide" à l'encontre d'Israël sont "sans fondement". "Nous continuons de penser que les accusations de génocide sont sans fondement et prenons note du fait que la Cour n'a pas conclu à un génocide ni appelé à un cessez-le-feu", a déclaré un porte-parole du département d'État.

En Israël, le ministre de la Sécurité intérieure, Itamar Ben Gvir, figure de l'extrême droite, appelle l'État à ne pas respecter les mesures conservatoires demandées par la CIJ, dont il estime qu'elles sont de "nature antisémite".

02:12 Jeudi, le Hamas s'était engagé à respecter un cessez-le-feu s'il était réclamé par la CIJ, mais à condition qu'Israël s'y conforme aussi.

La guerre a été déclenchée par l’attaque sans précédent du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre, qui a entraîné la mort de plus de 1 140 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles. Israël a juré d’"anéantir" le Hamas et a lancé une vaste opération militaire, qui a causé la mort de plus de 26 000 Palestiniens, en grande majorité des femmes, des enfants et des adolescents, selon le dernier bilan établi par le ministère de la Santé du mouvement islamiste.

France 24 Avec AFP